Quel impact aura la crise sanitaire du coronavirus sur les Grandes Ecoles ?

Depuis le 16 mars, les établissements scolaires ont fermé leurs portes. Si le ministre de l’Éducation Nationale a récemment évoqué un possible retour en classe le 4 mai, le scénario définitif n’est pas encore acté. Ce dernier évoluera très certainement en fonction de l’épidémie mais, en attendant, quelque 12 millions d’enfants et d’étudiants sont obligés de suivre leurs cours chez eux, à distance.

Certains établissements ont parfaitement pris le pli du « 100% digital » quand d’autres, au contraire, ont rencontré davantage de difficultés. Qu’en est-il pour les Grandes Écoles ? Et quels dispositifs ont-elles mis en place pour assurer la continuité de leurs enseignements ?

Certaines écoles internationales avaient vu la crise arriver

La présence en Chine et en Italie : un avantage pour se préparer au confinement

Si la plupart des Français ne s’attendaient pas à être confinés chez eux si rapidement, plusieurs Grandes Écoles se préparaient déjà à la fermeture de leurs campus. Les établissements qui possèdent des antennes en Chine ou en Italie avaient déjà fermé leurs locaux quelques semaines auparavant. C’est le cas de l’ESCP à Turin, SKEMA BS à Suzhou, Audencia BS à Shenzhen, etc.

De même, les Grandes Ecoles, qui envoient chaque année nombre de leurs étudiants en échange, ont dû faire face au rapatriement massif de ces derniers, en priorisant ceux localisés dans les zones où l’épidémie s’est développée plus rapidement. Ces établissements étaient donc, de fait, préparés à ce que le Coronavirus arrive en France de manière assez brutale, à l’image des situations vécues par les étudiants expatriés.

Plusieurs écoles ont donc organisé des cours en ligne, pour éviter le rassemblement d’étudiants au sein de leurs campus.

Les premières écoles à proposer des cours à distance

Avant même les annonces d’Emmanuel Macron, certaines écoles avaient déjà annoncé le passage au 100% online, à l’instar de Rennes School of Business, de Grenoble EM ou encore de emlyon bs.

Ces mesures résultent de plusieurs semaines de réflexion, comme l’explique par exemple le DG l’EM Normandie Élian Pilvin : « Nous avons été alertés de la situation […] autour du 26 décembre. Nous avons ouvert une cellule de crise qui se réunit régulièrement depuis le 6 janvier, date à laquelle il a fallu adapter les plannings académiques en fonction des rapatriements. »

Toutefois, même si les établissements scolaires se sont montrés proactifs dans la gestion de crise, certains ont pris la décision de fermer complètement, une semaine, afin de laisser du temps à l’administration et aux professeurs de s’adapter aux cours à distance.

Quels impacts pour la scolarité des étudiants ?

Le report ou l’annulation des événements étudiants

À cause de la crise, les écoles et les associations ont annulé énormément d’événements organisés par des étudiants. C’est le cas des OJO ou du Challenge Ecricome.

Au-delà du simple aspect « loisir » ou « récréatif », ces événements sont très importants dans le monde des Grandes Ecoles, puisqu’ils permettent aux étudiants de mettre en pratique leurs enseignements théoriques. Pour certains étudiants impliqués dans l’organisation de ce genre de rassemblement, comme Anaëlle Michelis, étudiante à TBS et présidente de l’association organisant le Trophée des Arts (TDA), cela représente une année de travail.

« L’association compte 41 membres, toutefois, le mandat précédent a également participé à l’organisation du TDA 2020. Au total, près de 80 étudiants ont contribué à la préparation de cette édition aidés par des prestataires.« 

Néanmoins, cette situation a poussé les étudiants à mobiliser d’autres ressources. Comme l’explique Anaëlle, « devoir annuler le TDA a engendré beaucoup de déception et de frustration. Malgré cela, nous ne nous sommes pas découragés car il a fallut se pencher rapidement sur les modalités d’annulation. Nous avons donc principalement travaillé sur les aspects juridiques et financiers et sur les engagements que nous avions auprès de nos partenaires. Finalement cette situation difficile a encore renforcé la cohésion de l’association.« 

Elle explique également que l’association « réfléchit à une alternative via une application ou les réseaux sociaux. » Bien que, « le caractère inédit de la situation ne [leur] permet pas encore de prendre une décision pour le moment.« 

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Le 100% online : une promesse réalisable ?

A l’instar de nombreuses entreprises qui, du jour au lendemain, ont mis en place le travail à distance, les établissements scolaires ont, quant à eux, dû assurer l’ensemble des cours en visioconférence.

Certaines écoles avaient déjà expérimenté différentes solutions à l’occasion de différentes crises. Le  SRAS en 2003, la grippe H1N1 (2009) ou, plus récemment, de l’épisode des grèves de décembre. Les établissements n’ont donc pas eu de mal à reprendre le rythme. D’autant plus que les outils d’enseignement à distance se sont considérablement améliorés ces dernières années.

In fine, le confinement n’a fait que précipiter les virages digitaux déjà entamés par bon nombre d’établissements. Les nouvelles technologies et les applications comme Microsoft Teams, Skype, Zoom (dont le cours en bourse s’est envolé ces derniers temps), permettent d’assurer, avec plus ou moins de succès selon le degré de préparation, la continuité et la qualité des cours.

Évolution de l’action de Zoom

Les Grandes Écoles nourrissent tout de même des inquiétudes vis-à-vis de la connexion internet, comme les entreprises. Toutefois, le réseau semble tenir le choc, malgré des pics de consommation inhabituels : « si cela a tenu jusqu’à présent et si cela tient cette semaine, les réseaux tiendront la charge dans les semaines qui suivent », précise Philippe Ciblat (spécialiste des réseaux de communication à Télécom ParisTech), dans une interview accordée au Parisien.

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Des stages et des périodes en entreprise annulés

« En stage de fin d’études au Luxembourg, les stagiaires de mon entreprise sont invités à rester chez eux. […] Nous sommes beaucoup à n’avoir aucune idée de comment gérer la situation (trou sur le CV, validation du diplôme, ainsi que notre arrivée sur le marché du travail pour le mois de septembre). »

Ce message, reçu sur l’Instagram de Business Cool, représente bien l’inquiétude des étudiants du supérieur. Ils sont nombreux à nous solliciter lorsque les entreprises annulent les processus de recrutement et les stage.

De leur coté, les écoles étudient actuellement les différentes solutions qu’elles peuvent offrir aux étudiants. Par exemple, l’ESC Clermont a mis en avant dans une FAQ différents cas de figure, afin d’aider les étudiants à se positionner et d’identifier dans quelle situation ils se trouvent.

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Des impacts à long terme à prévoir ?

La problématique des concours

Les filières post-bac annulent les épreuves écrites et les remplacent par une étude de dossier. Côté prépa, les écrits ne pourront pas se dérouler avant fin mai. Mais aucune information n’a été donnée concernant l’aménagement des épreuves ou la possible modification des coefficients.

Enfin, les Grandes Ecoles de management ont entériné cette semaine la décision de ne pas faire d’oraux post-prépa. Ces informations sont directement relayées sur Major-Prépa, suivi par de nombreux étudiants de cette filière.

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Une méfiance vis-à-vis de l’international à redouter ?

Certaines écoles, qui misent sur l’international, redoutent l’impact que pourra avoir la crise sanitaire à plus long terme.

Dans une interview donnée pour Business Cool, Christophe Germain, DG d’Audencia BS, expliquait : «  Demain, ne va-t-il pas y avoir une appréhension à voyager ? Les étudiants ne vont-ils pas opérer un recentrage sur les institutions locales ? Nous n’en sommes qu’au début, mais cette crise va forcément avoir un impact sur les comportements. »